J. F. Campbell Collection > Cabinet des fées, ou, Collection choisie des contes des fées, et autres contes merveilleux, ornés de figures > Volume 10

49^ Les mille et une Nuits,
qu'Aladdin avoit perdu l'efprit ; quelques-uns
n'en firent que rire : mais les gens les plus rai-
fonnables , & particulièrement ceux qui avoient
eu quelque liaifon d'amitié & de commerce
avec lui , en furent véritablement touchés de
compaffion. Il demeura trois jours dans la ville
en allant tantôt d'un côté , tantôt d'un autre ,
& en ne mangeant que ce qu'on lui préfen-
toit par charité, & fans prendre aucune réfo-
lution.
Enfin , comme il ne pouvoit plus , dans l'é-
tat malheureux où il fe voyoit , rcfter dans une
ville oil il avoit fait une fi belle figure , il en
fortit, & il prit le chemin de la campagne. Il
fe détourna des grandes routes > & après avoir
traverfé plufieurs campagnes dans une incerti-
tude afireufe , il arriva enfin à l'entrée de. la
nuit au bord d'une rivière ; là il lui prit une
penfée de oéfefpoir : Où irai-je chercher mon
palais , dit-il en lui-même? En quelle province j
en quel pays , en quelle partie du monde le
trouveraLrje , auffi-bien que ma chère princeflTe
que le fultan me demande ? Jamais je n'y réuf-
firai ; il vaut donc mieux que je me délivre de
tant de fatigues qui n'aboutiroient à rien , &
de tous les chagrins cuifans qui me rongent.
Il alloit fe jeter dans la rivière , félon la ré-
folution qu'il venoit de prendre; mais il crut
en