J. F. Campbell Collection > Cabinet des fées, ou, Collection choisie des contes des fées, et autres contes merveilleux, ornés de figures > Volume 2

436 le Mouton.
ferai ta petite Ragotte , j'ajouterai vingt royau-
mes à celui que tu polTèdes , cent tours pleines
d'or, cinq cens pleines d'argent; en un mot,
tout ce que tu voudras.
Madame Ragotte , lui dis-je , ce neû point
dans le fond d'un trou où j'ai penfé être rôti ,
que je veux faire une déclaration à une per-
fonne de votre mérite ; je vous fupplie , par
tous les charmes qui vous rendent aimable, de
me mettre en liberté , &c puis nous verrons en-
femble ce que je pourrai pour votre fatis-
faftion. Ha ! traître , s'écria-t-elle , fi tu m'ai-
mois , tu ne chercherois point le chemin de ton
royaume ; dans une grotte , dans une renar-
dière , dans les bois , dans les deferts, tu ferois
content. Ne crois pas que je fois novice ; tu
fonges à t'efquiver , mais je t'avertis qu'il faut
que tu reftes ici ; & la première chofe que tu
feras , c'efl de garder mes moutons : ils ont de
l'efprit, & parlent pour le moins aufli bien que
toi.
En même tems elle s'avança dans la plaine
où nous fommes , & me montra fon troupeau.
Je le confidérai peu ; cette belle efclave qui
étoit auprès d'elle m'avoit femblé merveilleufc;
mes yeux me trahirent. La cruelle Ragotte y
prenant garde , fe jeta fur elle , & lui enfonça
un poinçon û avant dans l'œil , que cet objet